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5 juin 2012

Formation des maîtres: rétablissement des modalités antérieures aux arrêtés de 2010 (Conseil d'État)

Le Conseil d'État, par un arrêt du 1er juin 2012 (n°341775), fixe au 31 juillet 2012 la date d'effet de sa décision du 28 novembre 2011 (AEF n°159045 et AEF n°158864) qui annulait une partie du nouveau dispositif de formation des maîtres mis en place à la suite de la « masterisation ». En conséquence, sauf à être modifiées selon les procédures régulières, les modalités antérieures vont être rétablies à cette date, en particulier celles qui portent sur la formation en IUFM, les modalités et le volume horaire des stages. Bernard Toulemonde, juriste et Igen honoraire, commente cet arrêt pour AEF.

Par une série d'arrêtés du 12 mai 2010, le ministre de l'Éducation nationale avait profondément réformé les modalités de la formation initiale des professeurs certifiés et agrégés. Ces nouvelles modalités ont suscité de très vives critiques en ce que notamment, elles écornaient profondément l'année de formation en IUFM, en alternance avec les stages dans les établissements scolaires. Le Conseil d'État, saisi par les organisations syndicales, avait validé le 28 novembre 2011, les dispositions relatives aux compétences professionnelles et aux modalités d'évaluation et de titularisation des enseignants stagiaires. En revanche, par la même décision, il avait annulé pour incompétence du ministre de l'Éducation nationale à agir seul, sans le ministre de l'Enseignement supérieur, d'une part les dispositions relatives au contenu des formations organisées par les IUFM pour les professeurs agrégés stagiaires, d'autre part celles portant cahier des charges des IUFM et définissant les modalités, les types de stage et leur durée ainsi que l'étendue dans le temps de la formation initiale des enseignants stagiaires.

Toutefois, conscient des difficultés d'application immédiate de son arrêt, en pleine année scolaire, le Conseil d'État n'avait pas fixé la date d'effet de ses annulations. Il avait sursis à statuer sur ce point, en attendant que les parties se rapprochent et, éventuellement, après analyse précise des conséquences de l'arrêt, lui suggèrent une date d'effet. En réalité, aucun consensus n'a été trouvé. Un parlementaire, Jacques Grosperrin, a tenté de régler la question par une modification législative, mais sa proposition de loi, votée par la seule Assemblée nationale (AEF n°162586), n'a pas abouti.

C'est pourquoi, cette fois, le Conseil d'État est amené à trancher la question, à la demande des organisations syndicales, dont les positions étaient divergentes : le Snes, le Snesup, la FCPE et diverses associations refusaient tout délai d'application, tandis que le Sgen-CFDT demandait de fixer une date laissant le temps nécessaire aux administrations pour préparer les stages de l'année scolaire 2012/2013. C'est dans cette dernière voie que le Conseil d'État va s'engager dans la présente décision.

LAISSER LE TEMPS À L'ADMINISTRATION ET AUX IUFM DE S'ORGANISER

L'arrêt rappelle d'abord la règle de droit : lorsque le juge administratif annule un texte, celui-ci disparaît de l'ordre juridique de façon rétroactive, « il est réputé n'être jamais intervenu » ; en conséquence, les textes antérieurs sont automatiquement remis en vigueur. Cette règle est apparue trop brutale dans certaines situations complexes : aussi, le Conseil d'État, depuis quelques années, lui apporte un tempérament, en s'autorisant dans certaines conditions à moduler dans le temps les effets de l'annulation. Ainsi s'il apparaît que l'effet rétroactif est de nature à emporter des conséquences « manifestement excessives » au regard des divers intérêts en présence, le juge peut décider, « par dérogation » et « à titre exceptionnel », que l'annulation ne prendra effet qu'à une date ultérieure, qu'il fixe, et/ou que tout ou partie des effets antérieurs à l'annulation seront regardés comme définitifs (sous réserve des actions contentieuses déjà engagées contre les décisions prises sur la base du texte en cause).

Faisant ensuite application de ces règles, le Conseil d'État analyse dans son arrêt les conséquences de ses décisions d'annulation du 28 novembre 2011. Il observe que celles-ci ont en principe pour conséquence de faire revivre la réglementation antérieure (arrêtés du 19 décembre 2006 portant cahier des charges de la formation des maîtres en IUFM et du 2 juillet 1991 relatives au contenu des formations en IUFM des professeurs agrégés stagiaires). Or, à la date de l'annulation, le rétablissement de la réglementation antérieure, en cours d'année scolaire, apparaît incompatible avec les modalités de stage alors pratiquées, abaisserait sensiblement le volume d'enseignement devant les classes sans que l'on puisse mettre en place des formules de remplacement assurant aux élèves une égale qualité d'enseignement, enfin conduirait à réorganiser dans des délais très brefs les enseignements supprimés dans les IUFM. En somme, « eu égard aux intérêts qui s'attachent à la continuité du service public d'éducation », l'arrêt décide que les annulations prononcées ne prendront effet qu'au 31 juillet 2012 et que, jusqu'à cette date, les effets produits par les dispositions annulées sont regardés comme définitifs (sous réserve des actions qui auraient été engagées devant les juridictions administratives avant la date du présent arrêt, fondées sur les dispositions déclarées illégales des arrêtés du 10 mai 2010).

Sagement, par cette décision, le Conseil d'État laisse à l'administration de l'Éducation nationale et aux IUFM le temps de s'organiser jusqu'à la rentrée scolaire prochaine soit en revenant, pour l'essentiel, au régime antérieur de formation des maîtres, soit en y apportant des modifications ou corrections dans les formes légales, à savoir par arrêtés des deux ministres chargés de l'Éducation nationale et de l'Enseignement supérieur.

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